L’IA en ophtalmologie : un moyen d'assister les praticiens au quotidien

Dépistage de la rétinopathie diabétique : l’IA peut-elle faire aussi bien que l’humain ? [1] [2]

L’IA a déjà permis de faire rentrer la rétinopathie diabétique (RD) dans une nouvelle ère avec l’existence de plusieurs algorithmes de dépistage.
Aux États-Unis, un programme conçu pour automatiser le diagnostic de la RD est autorisé depuis 2018. Ce logiciel, opérant sur photographie du fond d’œil, permet de classer les patients selon leur degré de RD. Les images sont envoyées vers un cloud qui héberge un algorithme capable de donner une réponse binaire : détection d’une RD (de stade modéré à sévère), le patient est alors invité à consulter un ophtalmologiste, ou absence de RD, proposant de refaire un contrôle 1 an plus tard.
La France n’est pas en reste dans le développement de tels outils, une société privée propose un algorithme intégré à une plateforme permettant le dépistage de la RD par télémédecine.
D’autres études innovantes sont actuellement en cours. Elles utilisent le machine learning couplé aux images de fond d’œil ou à l’OCT et le deep learning couplé à l’OCT.

Focus sur le projet EVIRED

« Au-delà du dépistage, l’avenir est d’anticiper la trajectoire de la rétinopathie diabétique. »
Visionnez la vidéo du Pr Ramin Tadayoni, porteur du projet EVIRED, professeur d’ophtalmologie à l’Université de Paris, chef de service à l’hôpital Lariboisière, l’hôpital Saint-Louis et l’hôpital Fondation Adolphe de Rothschild.

 Interprétation automatisée des OCT : voir ce que l’œil ne voit pas [3] [4] [5]

Différencier les différents types de liquide rétinien dans les maladies maculaires exsudatives telles que l’occlusion veineuse rétinienne, la DMLA néovasculaire ou l'œdème maculaire diabétique, est maintenant possible.
L’IA est ainsi capable de segmenter les liquides intra et sous-rétiniens, les drusen, les décollements de l’épithélium pigmentaire, voire les atrophies géographiques avec une grande précision.
Une équipe a montré qu’un logiciel d’IA pouvait repérer les signes d’activité grâce à l’évolution et à la disposition du fluide. L’algorithme a permis de détecter les signes exsudatifs en OCT en comparaison avec trois rétinologues.

Les progrès récents dans la segmentation montrent des performances comparables entre les mesures humaines et les algorithmes d’IA.
Ci-contre, vous trouverez un exemple de résultats de segmentation proposés par un algorithme versus deux rétinologues.
(a,e) image d’origine ; (b,f) signal de segmentation proposé par un algorithme ; (c,g) annotations manuelles effectuées par le rétinologue 1 ; (d,h) annotations manuelles effectuées par le rétinologue 2[5].
Ces images sont reproduites avec l’aimable autorisation du Dr Venhuizen.

Prédire pour mieux prescrire : et si l’IA pouvait optimiser les protocoles d’injection de la DMLA néovasculaire ? [6] [1]

Les injections intravitréennes (IVT) dans le traitement de la DMLA exsudative nécessitent une surveillance rapprochée des patients par la mesure de l’acuité visuelle et par l’analyse des images OCT.
Des travaux ont cherché à prédire le nombre d’IVT nécessaire à un patient durant les deux premières années de son traitement à partir des images OCT de la dose de charge (trois injections mensuelles).
Les patients ont été séparés en 3 groupes (nombre d’IVT nécessaire : faible → 0-6, modéré → 6-15, élevé → 6-21). L’utilisation de l’IA a permis de prédire le nombre d’IVT nécessaire dans 70 % des cas, alors que l’homme n’y parvenait que dans 25 % des cas. D’autres travaux ont été réalisés pour trouver l’intervalle de réinjection optimal en schéma “Treat and Extend”.

Essais cliniques : et si l’IA permettait de gagner en efficacité ? [6]

Domaine de l’expérimentation « réelle » par excellence, la recherche clinique pourrait pourtant fortement bénéficier de l’IA.
Les possibilités sont nombreuses :     

  • aide à la conception méthodologique et statistique des protocoles d’études, sur la base des essais déjà réalisés,

  • sélection optimisée des patients inclus ou exclus pour limiter les biais de sélection,

  • collecte automatisée des données détectant les anomalies,

  • standardisation de l’analyse des résultats d’imagerie, afin d’éviter les biais liés à la variabilité inter et intra-praticien,

  • analyses exploratoires des données permettant de détecter de nouveaux facteurs prédictifs de réponse aux traitements, 

  • établissement de modèles d’évolution de la maladie, pouvant laisser envisager, dans certaines situations, de réduire la durée des études voire de se passer d’un bras contrôle (et augmenter le nombre de patients dans le bras d’analyse).

Ces développements sont encore assez théoriques mais très prometteurs et pour certains déjà en expérimentation. On conçoit aisément les bénéfices des possibilités évoquées, avec des essais cliniques plus courts, moins coûteux, et conduisant à des réponses plus rapides pour les patients.

Références
[1] Gualino V, Guigou S. Intelligence artificielle et rétine. Images en Ophtalmologie. 2019:13(6).
[2] Keskinbora K, Güven F. Artificial Intelligence and Ophthalmology. Turk J Ophthalmol. 2020;50:37-43.
[3] Schmidt-Erfurth U, et al. Artificial intelligence in retina. Prog Retin Eye Res. 2018 Nov;67:1-29.
[4] Gualino V, Guigou S. Intelligence artificielle et nouvelles technologies pour le diagnostic et le suivi des pathologies rétiniennes. Les Cahiers d’Ophtalmologie. Mai/Juin 2020;n°236/237:30-3.
[5] Venhuizen FG, et al. Deep learning approach for the detection and quantification of intraretinal cystoid fluid in multivendor optical coherence tomography. Biomed Opt Express. 2018 Mar 7;9(4):1545-1569.
[6] Cai L, et al. Applications of Artificial Intelligence for the Diagnosis, Prognosis, and Treatment of Age-related Macular Degeneration. Int Ophthalmol Clin. 2020;60(4):147-168.

M-FR-00007093-1.0
Établi en décembre 2022